WEPOT, l’art de la micro-irrigation par 2 étudiants-entrepreneurs et les ateliers protégés La Cordée

WEPOT, c’est l’idée de deux étudiants en bachelor à la HEC-Lausanne, Quentin Kany et Clément Perez, passionnés par l’entrepreunariat. Après de nombreuses heures à rêver de la création de leur propre projet sur les bancs de l’université, ils prennent leur courage à deux mains en 2018 et se lancent le défi de participer au concours START, organisé par l’association étudiante START Lausanne, qui aide les étudiants à transformer leurs idées en start-up sur une année. Clément et Quentin n’ont pas de connaissance spécifique en gestion des ressources environnementales, mais veulent contribuer à la réduction de l’impact humain sur la planète et choisissent de se focaliser sur la préservation des ressources en eau.

Après quelques recherches, ils découvrent l’existence d’une technique d’irrigation ancestrale, l’olla (prononcée “oya” comme en espagnol), utilisée en Asie, Afrique et Moyen-Orient mais peu connue de nos contrées. L’olla est un pot en argile à la paroi poreuse, qui s’enterre à côté des plantes et que l’on remplit d’eau. À terme, les plantes fixent leurs racines sur les parois de l’olla afin de puiser l’eau dont elles ont besoin sans stress hydrique. Cette technique permet d’économiser 50 à 70% d’eau et évite le développement de mauvaises herbes. Convaincus de son efficacité, les deux étudiants décident alors de la remettre au goût du jour à travers la création de leur start-up, WEPOT. Mélissa Fahrni, céramiste, les rejoint un peu plus tard afin de les aider à mettre en place le processus de production des ollas. 

De gauche à droite, Quentin, Mélissa et Clément. ©WEPOT

 

Des valeurs socio-environnementales fortes  

Sur le marché depuis mars 2019, ils incarnent des valeurs sociales et environnementales fortes à travers la production et la distribution des ollas. En faveur des circuits courts et locaux, l’argile est de provenance suisse et ils distribuent leurs ollas via de petits partenaires locaux (épiceries de vrac, fleuristes, etc.) ou sur internet. Les ollas sont produites à la fois par eux-mêmes et par l’atelier protégé de La Cordée, qui accueille des personnes en situation de handicap mental pour leur donner la possibilité de devenir plus autonomes dans leur vie professionnelle.

Curieux de leur cheminement, nous sommes partis à leur rencontre afin de leur poser quelques questions et obtenir un peu de leurs conseils pour passer à l’action…

Deux petites ollas prenant soin des herbes aromatiques. ©WEPOT
Quels sont vos conseils pour se lancer?

« Le conseil qu’on donne à tout le monde c’est vraiment de se lancer dans des concours, c’est le plus formateur. »

Tu vas être challengé, tu as des deadlines et ça, c’est le plus important, surtout au début où il est très dur de se mettre des deadlines tout seul. Pour les étudiants de l’Unil ou de l’EPFL qui veulent se lancer, foncez sur le concours START, c’est une pépite. Pour nous, ça a vraiment été le déclic. Tu peux juste partir d’une idée, mais le petit plus, c’est de venir préparé au maximum, et si possible avec un business plan. Cela te permet de bénéficier de conseils encore plus pertinents, et au final, c’est souvent ceux qui ont déjà travaillé en amont du projet qui remportent les prix car ils ont plus d’avance. Dans tous les cas, même si tu perds, tu gagnes en crédibilité, tu es coaché et tu rentres gentiment dans le milieu de l’entrepreneuriat.

On a nous-mêmes terminé troisième, à une place de recevoir un prix. C’était difficile de perdre, parce qu’après un an de travail et tous les efforts fournis, on remet en question notre projet. Alors qu’en réalité, il y a juste beaucoup de projets géniaux pour un ou deux gagnants. Quelques semaines après la fin du concours nous avons fais une petite pause.  On s’est ensuite retrouvé et on s’est dit qu’on aimait trop ce qu’on avait fait pour baisser les bras et tout lâcher, alors on a décidé de se lancer de notre côté.

« L’union fait la force. »

Cela aurait été très difficile de se remotiver après le concours si l’on avait été seul, et cela dans beaucoup de moments difficiles tout au long du projet. Être deux permet de se motiver et se soutenir les uns et les autres, se compléter, réfléchir ensemble, se challenger, etc.

« Le meilleur cours, c’est d’aller sur le terrain! »

Si tu crois à ton projet, fonce et tu verras. À un moment tu vas tomber mais tu te relèveras encore plus fort.e. Teste, demande de l’aide autour de toi, et vas-y. Il faut arrêter de trop réfléchir et tourner autour du pot. 

"L'union fait la force." © WEPOT
Qu’est-ce qui vous a passionné jusqu’ici dans votre projet?

Créer quelque chose de A à Z, recevoir les retours des clients qui nous sont reconnaissants, donner un travail qui ait du sens à des personnes, c’est super valorisant. La première fois que nous sommes allés aux ateliers de la Cordée, ils étaient en train de plier des serviettes, c’était assez triste. Maintenant, c’est drôle car à chaque fois qu’on leur rend visite on est pris pour des héros parce qu’ils adorent produire les ollas. Ce genre de projet peut prendre une dimension sociale vertueuse.

“C’est comme si tout un écosystème se créait autour de notre projet et prenait de plus en plus d’ampleur au fil du temps.”

Toute cette synergie nous nourrit et nous donne la force et l’envie de continuer. C’est même parfois difficile de se cadrer tellement les idées abondent.

Comment ont été les débuts du projet financièrement? Arrivez-vous à en vivre aujourd’hui? 

On a la chance d’avoir nos familles qui nous soutiennent et à qui on a pu emprunter de l’argent sur le long terme pour démarrer le projet. Nous leur en sommes très reconnaissants et leur rendons au fur et à mesure de nos avancées. On fait toujours attention à garder un fond et à choisir la sécurité. Par exemple, après les ventes de cette année on aurait pu nous tirer un petit salaire, mais après réflexion on a préféré attendre et réinvestir cet argent pour consolider notre start-up et subvenir aux besoins des projets.

 On a commencé le projet en parallèle des études et au début c’était plus un challenge qu’autre chose, on ne se souciait pas de notre sécurité financière. Aujourd’hui c’est différent, on y passe énormément de temps et comme on termine bientôt les études, on aimerait pouvoir se rémunérer rapidement.

Les ollas prennent aussi soin des plantes d'intérieur. ©WEPOT
Comment conciliez-vous votre vie d’entrepreneurs avec votre vie personnelle et étudiante?

Faire de l’entrepreneuriat, c’est beaucoup de travail et d’investissement, parfois on se retrouve à faire des nuits blanches suivant nos engagements. Cette année on doit rédiger nos mémoires de fin d’études que l’on se retrouve à repousser mois par mois. Quentin est maintenant en Master “Management du Sport” donc ce n’est pas du tout lié, et moi (Clément) je suis toujours à HEC en Master “Business Analytics” donc je vais essayer de faire mon mémoire sur WEPOT mais je dois encore trouver un sujet et un superviseur.

C’est un combat de tous les jours de trouver comment fonctionner mais on est pas non plus des acharnés du travail. On essaie toujours de trouver des moments pour profiter de nos vies étudiantes, on se libère du temps pour faire du sport, être avec nos amis, nos familles. Le tout est de trouver un équilibre. 

Production d'ollas aux ateliers protégés de La Cordée. ©WEPOT
Quelles galères avez-vous rencontré jusqu’ici?

L’entrepreneuriat c’est continuellement de la résolution de problèmes, il y a toujours quelque chose à penser ou à faire. On a envie de lancer plein de choses mais on a souvent l’impression qu’on doit en régler plein d’autres derrière. 

Par exemple, en octobre 2019, on nous a proposé de monter un atelier de production au Sénégal, dans le cadre du développement d’une ferme agroécologique par l’association “Plantons Utile”. C’était un super projet alors on a laissé de côté le développement de WEPOT en Suisse et on s’est mis à travailler deux mois pour lancer un crowdfunding, sauf qu’au final on n’a pas réussi à récolter l’argent. Le crowdfunding n’était peut-être pas adapté pour un projet social à but humanitaire, ou peut-être qu’il était encore trop tôt pour nous de nous lancer là-dedans.

« Même si ça n’a pas marché, on aura acquis de l’expérience. »

Et finalement, ça nous aura permis de nous concentrer sur le développement de WEPOT en 2020. Et puis si on est amenés à créer un autre crowdfunding plus tard, on sera prêt. 

Les ollas aux mains de Mélissa, la céramiste. ©WEPOT

Autre galère, en 2020, les commandes des ollas ont explosé avec la COVID et les ateliers avaient fermé pour des raisons sanitaires donc on s’est retrouvé coincé et on a dû commencer à produire de notre côté. On ne connaissait rien à l’argile, alors Mélissa nous a formé et on a aménagé le garage des parents à Clément en attendant d’investir dans la location d’un atelier perso. Maintenant on peut dire qu’on est des “céramistes amateurs”! On avait aussi vu une super offre pour un four sauf qu’à sa livraison on s’est rendu compte qu’il ne passait pas la porte, alors on a dû le faire acheminer par les fenêtres à 8m de haut. On n’avait pas non plus pensé qu’il y avait besoin d’une installation électrique spécifique pour brancher le four, et au final, tout cela nous a coûté 4 fois plus cher que le prix du four!

Récemment on a aussi investi dans une imprimante 3D pour développer de nouveaux produits sans trop réfléchir sauf qu’elle est super volumineuse et qu’elle fait un bruit pas possible pendant les impressions qui durent 24h! Elle va sûrement se retrouver dans la chambre à Clément qui va devoir dormir avec. De toute façon, il est habitué, sa chambre a déjà aussi été submergée par des piles et des piles de cartons pour la livraison des ollas et qui n’étaient même pas à la bonne taille!

« Ça reste des petites galères donc on prend ça à la rigolade et on reste positif. On apprend en faisant. »

Avec un peu de recul, qu’est-ce qu’il vous paraît important de prendre en compte lors du développement de son projet? 

« La transparence et l’échange, sont des clés pour évoluer. »

Nous parlons de notre projet très facilement, ce qui nous permet d’avoir des échanges constructifs et de nous challenger. La rencontre avec des personnes différentes de notre milieu est vraiment enrichissante. On cherche souvent à faire des pitchs qui vont ensuite nous permettre de brainstormer et de développer nos idées. On choisit également de s’entourer de personnes spécialisées dans les domaines dont on a besoin – Mélissa notre céramiste, un horticulteur pour optimiser l’irrigation des plantes, nos amis dans la finance, etc. Cela nous permet d’acquérir plus de crédibilité.

« Prendre soin de la visibilité de son projet est super important pour développer les partenariats. »

On s’implique dans des incubateurs à start-up comme Impact Hub pour présenter ce que l’on fait, on développe notre site web pour plus de crédibilité. Publier un article avec Terre & Nature nous a permis de faire notre journée record en termes de ventes. On travaille également avec des petits influenceurs sur les réseaux sociaux en faisant des concours de communauté, ça marche super bien. 

« Chaque chose doit se faire en son temps. »

On dit toujours qu’il est important de se fixer des deadlines pour se motiver et aller plus vite, cependant il faut faire attention à ne pas non plus griller les étapes. Il faut anticiper un minimum et savoir prioriser, au risque de se retrouver submergé ou en insécurité financière. 

Quels développements futurs souhaitez-vous apporter à votre projet?

Notre objectif principal est de remettre au goût du jour cette technologie d’irrigation ancestrale, la vendre en Suisse et en faire un business rentable pour ensuite financer la recherche de solutions d’irrigation pour de plus grandes surfaces dans les milieux arides. Toujours en se basant sur la technique d’argile poreuse, parce que ça a vraiment beaucoup d’avantages, et en gardant les principes de l’économie circulaire qui nous tiennent vraiment à cœur depuis le début. 

À plus court terme pour 2021, on se concentre sur une levée de fonds pour acheter du matériel et créer notre propre manufacture pour accélérer la production. On produit au maximum de ce qu’il est possible avec les travailleurs de la Cordée et nous ne voulons pas les stresser pour produire plus. Cela prend plusieurs mois de mettre en place le processus, former une personne responsable de la production et enseigner les techniques aux travailleurs. Face au manque de temps et de ressources pour répondre à la demande actuelle, c’est plus simple pour nous de compléter la production par nous-même pour le moment mais sur le long terme on aimerait vraiment travailler avec d’autres ateliers protégés ou dans le milieu pénitentiaire. L’accélération de la production nous permettra ensuite de lancer les expériences et les recherches scientifiques pour démontrer les bienfaits de l’olla et développer des solutions sur de plus grandes surfaces. On espère aussi pouvoir nous dégager un revenu. 

En avant pour chouchouter nos plantes et manger des légumes colorés cet été. ©WEPOT

 

On se réjouit déjà de suivre les futures aventures de notre trio et de retrouver leurs jolies ollas dans les bacs urbains de nos villes, dans nos jardins, à la maison, chez nos voisins… 

Pour prendre soin de vos plantes et en savoir plus sur WEPOT, vous pouvez les retrouver ci-dessous sur votre plateforme préférée!

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